Plus de 40 nouvelles lois européennes en 5 ans : les entreprises technologiques belges ne peuvent plus suivre
Agoria exige une simplification numérique ambitieuse

Mardi prochain, la Commission européenne présentera son très attendu « Digital Simplification Package ». Son objectif : réduire la charge administrative en simplifiant des réglementations complexes et parfois redondantes. Elle souhaite également créer une sécurité juridique au sein des États membres afin d’aider les entreprises européennes à rester compétitives au niveau mondial. L’accent porte notamment sur les données, l’IA et la cybersécurité.
Ces dernières années, les réglementations numériques européennes se sont succédé à un rythme soutenu. Le 2 août 2025, de nouvelles obligations issues de l’AI Act sont entrées en vigueur, suivies en septembre par celles du Data Act. Une avalanche de nouvelles règles en matière de cybersécurité a également été introduite, tant horizontales (NIS2, CRA, CSA, CER) que sectorielles (RED DA, DORA). D’autres règlements, nouveaux ou révisés, imposent également des exigences en cybersécurité : dispositifs médicaux, R155/R156, CPSR, règlement Machines, AI Act.
Toutes ces lois et directives se chevauchent très souvent, entraînent une charge administrative considérable et placent les entreprises face à des défis de mise en conformité parfois impossibles en raison de délais extrêmement serrés.
« Si les mesures annoncées la semaine prochaine sont aussi ambitieuses que nous l’espérons, elles n’arriveront pas une minute trop tôt pour nos entreprises technologiques », déclare Bart Steukers, CEO d’Agoria. « Au cours des cinq dernières années, plus de 40 nouveaux textes législatifs ont submergé nos entreprises. Le coût pour l’ensemble de l’économie européenne se chiffre en dizaines de milliards. Agoria réclame une profonde simplification du cadre réglementaire. »
Agoria voit poindre un immense défi de conformité. Beaucoup d’entreprises, en particulier les nombreuses PME de notre pays, ne sont absolument pas préparées. C’est pourquoi la fédération technologique formule plusieurs demandes concrètes aux responsables politiques belges qui nous représentent en Europe :
1. Adapter le calendrier de l’AI Act
Les entreprises ont besoin de suffisamment de temps pour se préparer aux nouvelles règles. L’AI Act impose des obligations pour les systèmes d’IA à haut risque dès août 2026, mais les premières normes harmonisées ne sont attendues qu’à la mi-2026. Les entreprises auront donc à peine le temps d’adapter leurs systèmes.
Agoria plaide pour : une entrée en vigueur des obligations de l’AI Act 12 mois après la publication des normes harmonisées.
2. Mieux aligner les règles horizontales et sectorielles
La législation générale, comme l’AI Act, le RGPD ou la Cyber Resilience Act, se superpose fortement aux règles sectorielles, telles que la directive Machines ou le règlement sur les dispositifs médicaux.
Ces différentes lois appliquent parfois des exigences contradictoires, ce qui laisse les entreprises dans le flou quant aux priorités.
Agoria demande : d’intégrer les exigences liées à l’IA directement dans la législation sectorielle et d’utiliser des définitions et une terminologie uniformes dans l’ensemble des réglementations.
3. Mettre fin aux triples rapports sur un même incident
Aujourd’hui, les entreprises doivent souvent signaler plusieurs fois le même incident de cybersécurité. En cause : des réglementations différentes - NIS2, Cyber Resilience Act (CRA), RGPD - qui imposent chacune leurs propres définitions, seuils, délais et contenus.
Agoria plaide pour : un principe de « only once », avec une notification unique à une entité centrale via un modèle uniforme, valable pour tous les cadres légaux.
4. Garantir une application uniforme des règles dans tous les États membres
Les règles européennes doivent être appliquées de manière homogène. Or, certains États ajoutent des exigences supplémentaires lors de la transposition des directives.
Un exemple clair est la fragmentation des audits NIS2 : les entreprises actives dans plusieurs pays doivent faire face à 27 exigences nationales différentes, alors que la directive prévoit une base commune.
Agoria demande : un véritable level playing field dans tous les États membres, avec reconnaissance mutuelle des audits et sans exigences nationales supplémentaires inutiles.
« Nous voulons tous sauver notre industrie belge et européenne, mais si nous continuons ainsi, nous n’y arriverons pas. Le rapport Draghi a mis le doigt sur la plaie. Si la simplification administrative n’est pas suffisamment ambitieuse et si nous n’arrivons pas à unifier davantage nos 27 marchés - aussi au niveau administratif - ce ne sera tout simplement pas suffisant. Nos entreprises risquent de s’enliser dans un marécage bureaucratique », conclut Bart Steukers.
Sarah Godard